dimanche 27 novembre 2011

La Vierge Marie favorite pour 2012 ?

2012 ne déroge pas à la règle qui fait de chaque élection présidentielle un vaste processus de « revirginisation » de la République par la grâce de l’amnésie quinquennale collective. Mais celui ou celle qui emportera le droit de s’unir à elle dans la chambre nuptiale élyséenne n’échappera pas aux misères de toute vie conjugale.
La Vierge République conçoit tous les ans, maire reste à jamais pure
La Vierge République conçoit tous les cinq ans, maire reste à jamais pure.
Le grand espoir de 2012
2012, impossible de passer à côté. On en croirait presque que ces quatre chiffres nous ont ensorcelés pour nous forcer à cracher au bassinet et y aller de notre petit commentaire. Comme vous pouvez le constater, même l’auteur de ces lignes a le regret de s’y sentir contraint.
Comme chaque grande année électorale, 2012 est vidée par avance de sa substance par l’évènement qu’elle va accueillir, et qui va la dévorer tout entière, à tel point qu’on en oublierait presque que le vote interviendra à une date précise. Sauf naissance, mariage ou décès familial, que nous évoquent 1981, 1995, 2002 ou 2007, sinon le nom du Président l’ayant emporté ou du candidat malheureux en ayant fait sa sépulture ?
On m’opposera certainement qu’à beaucoup, 2012 évoque aussi – et avant tout – un film catastrophe et la date annoncée de la fin du monde. Nous laisserons les Mayas et leur calendrier meurtrier en dehors de tout ça, mais au-delà de l’éternel recommencement de la bêtise millénariste qui ne semble pas épargner notre génération, ce n’est peut-être pas un hasard si la date annoncée de fin du monde coïncide avec cette année électorale. Car une élection présidentielle, c’est bien une fin… et un recommencement inavoué.
Immaculée conception
« Dépasser les clivages » entre générations, classes sociales et opinions politiques, « instaurer un nouveau contrat de confiance » entre l’électorat et son Représentant, « ranimer l’espoir » d’un peuple ayant cessé d’y croire… Non, il ne s’agit pas du programme des révolutionnaires de 1789, ni même de 1917, mais tout simplement des ambitions des prétendants à la magistrature suprême en 2012. Ça vous rappelle quelque chose ? Eh bien ravalez votre venin, sales vipères cyniques et nihilistes, car 2012 sera différente, 2012 sera un nouveau départ, une nouvelle virginité pour la République.
Ah ! Nous y voilà : Marie sort du bois. Grâce à Dieu, la maman de Jésus est là pour nous enlever une sacrée épine du pied ! Son nouveau petit nom sécularisé est certes un peu moins glamour, mais le tour de magie fonctionne toujours : la République a déjà conçu (maintes fois, même – en moyenne, tous les cinq à sept ans), mais elle se présente toujours vierge au futur père de ses enfants qui, sitôt sa conquête accomplie, s’en vient la féconder en deux tours trois mouvements sur le balcon de l’Elysée.
Sceptiques, détrompez-vous, l’Immaculée Conception est plus aisée qu’on est généralement porté à le penser : procédure de divorce avec le précédent locataire, hymen recousu et on n’en parle plus. Bien entendu, elle requière également un petit effort aisément consenti d’amnésie collective à l’égard du Péché Originel. Il faut certes mettre un peu de conviction dans les appels publics à « foutre dehors » ou « faire dégager » celui qui est arrivé dans le lit de la République par Grâce divine ou coup d’Etat médiatique, mais certainement pas par « notre » bulletin de vote. Cet effort est nécessaire, car une « première fois » ne peut bien sûr pas se produire deux fois – du moins, pas au vu et au su de tous. En effet, quand bien même tous les éléments du tableau seraient là pour nous faire oublier que l’hymen a été recousu, les souvenirs de son perforateur, eux, resteraient.
Sang neuf et hymen recousu
D’ailleurs, pourquoi croyez-vous qu’à l’occasion de chaque grande catharsis présidentielle le Peuple demande inlassablement du « sang neuf » – en bref, un puceau pour ne pas trop effaroucher la vierge – mais finit toujours par élire un vieux de la vieille qui, lui, n’est pas dupe de la supercherie ? Qu’était feu le favori des sondages deux-mille-douziens sinon l’archétype du mâle magnanime capable de fermer les yeux sur les aventures prénuptiales de sa légitime ?
Personne n’est dupe : l’idylle n’a lieu qu’une fois, et elle est de courte durée. Sitôt mariée, l’épouse lasse pense déjà à aller voir ailleurs. Vous me prenez pour un affreux cynique ? Aurais-je l’impolitesse de rappeler le premier mot venu à la bouche de la République épousée en 2007 ? Je l’aurais : 2012. Et écoutez un peu comme le son du mot que je vais prononcer caresse déjà délicatement votre oreille, frotte langoureusement votre épiderme comme la promesse d’une alliance en or massif échangée avec passion sur le perron de l’Elysée : deux-mille dix-sept.

NOTE : aux curieux qui se demanderaient à juste titre ce qui se produirait si l’organe génital d’une Présidente se présentait au seuil de la chambre nuptiale élyséenne, je n’aurais pas la faiblesse de renvoyer à l’hypothèse d’une stérilisation définitive de la République : la contraception politicienne et communicante se charge déjà avec brio de l’opération.

2 commentaires:

  1. Le sexe féminin serait-il alors incompatible avec cette "vie conjugale" élyséenne qui est re-bénite à chaque élection ? Partant de cette interrogation et au vu de votre argumentaire, on peut penser qu'une femme est peut être plus que jamais nécessaire pour briser cette alliance impure entre la vierge et trompeuse République et des hommes politiques avides et "obsédés" qui se l'accaparent bien vite aux dépends de ses géniteurs les français qui veulent encore croire en sa sainteté...

    RépondreSupprimer
  2. J'ai bien peur que sitôt le seuil de la chambre conjugale franchi par un vagin, cette forme inédite d'alliance saphique ne devienne la nouvelle norme et ne prenne en quelques mois les rides qu'il a fallu des siècles pour creuser sur l'antichambre de la puissance phallique. Je crains que le petit jeu républicain ne fasse que s'inverser et finisse par contaminer le deuxième sexe de sa répugnante maladie électoralement transmissible. En bref, que la Femme ne perde réellement sa virginité politique à l'épreuve, précisément, d'une vie conjugale qui, quelles que soient les promesses de départ, ne peut malheureusement à mon sens que décevoir les plus transis des amoureux(ses).

    RépondreSupprimer